PEUT-ON (ENCORE) SAUVER LE MODÈLE AGRICOLE FRANÇAIS?
Par Pascal BRINDEAU
Publié le 27 Fév, 2025
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L’édition 2025 du salon de l’agriculture 61eme du nom s’est ouverte samedi 22 février dans un calme apparent au regard de la visite chahutée d’Emmanuel Macron en 2024.
Calme apparent car depuis un an, et les manifestions des agriculteurs pour un revenu décent , rien ou si peu n’a changé. La concurrence déloyale de pays ne respectant pas les mêmes normes environnementales et sociales que la France, les accords de libre échange faisant de l’agriculture une variable d’ajustement, la pression de la grande distribution sur la rémunération des paysans, les surtranspositions et la suradministration sont toujours le quotidien de nos agriculteurs.
Calme apparent car les agriculteurs ont bien conscience qu’avec la dissolution et la composition actuelle de l’Assemblee nationale, le président de la République n’a plus la main sur la politique qui peut être menée en leur faveur, ni à l’intérieur car il n’a plus de majorité parlementaire, ni à l’extérieur car sa parole n’a plus de crédibilité.
Calme apparent qui peut s’apparenter à la résignation qui suit une année 2024 calamiteuse du point de vue des récoltes et des aléas climatiques.

Le résultat des élections aux chambres d’agriculture, et la percée historique de la coordination rurale, est le signe que la colère gronde toujours.

Il est aussi le signe d’un changement de paradigme du syndicalisme agricole de plus en plus revendicatif et de moins en moins en cogestion comme c’était la tradition.

Face aux immenses menaces qui pèsent sur notre agriculture nationale, dans le nouveau contexte mondial issu de l’élection de Donald Trump et son néo -protectionnisme exacerbé, et dans un environnement climatique de plus en plus incertain, le modèle agricole français peut-il (encore) être sauvé?
La surface agricole utile qui représente environ 27 millions d’hectares ne cesse de diminuer à une cadence accélérée depuis les années 2000.
La France ne comptait plus en 2020 que 320000 exploitations agricoles , chiffre en diminution de 2,3% par an.
421 000 chefs d’exploitation ont été recensés en 2024 par la MSA, il étaient 442 000 en 2023. En 2019 le nombre d’exploitants agricoles était en 2019 de 400 000 représentant 1,5 % de l’emploi total en France; en 1982 ils étaient 1,6 millions représentant 7% de l’emploi total.
Dans le même temps le nombre d’ouvriers agricoles a également diminué passant de 310 000 en 1982 à 250 000 en 2019.
En 2019, 55% des exploitants avaient 50 ans et plus, ce qui pose, nonobstant l’ensemble des autres données, un sujet intrinsèque de transmission des entreprises et de formation aux métiers de l’agriculture.

Pour sauver notre modèle agricole, il faut un remède de cheval.

Il apparaît aujourd’hui que sans une refonte complète de notre politique agricole, la souveraineté alimentaire dont nous avons toujours pu être fiers et la ferme France sont vouées à disparaître.  Une refonte qui trouve à la fois ses effets dans des mesures nationales et dans des mesures européennes.
En premier lieu, et le débat actuel au sein de l’UE concernant le Mercosur en est l’exemple flagrant, il faut trancher entre la vision libérale de la Commission européenne, pour laquelle l’agriculture semble être une monnaie d’échange au profit d’autres intérêts, notamment industriels, et l’opposition des agriculteurs français et européens à cet accord de libre échange qui les mettrait en danger.
Il est URGENT de revenir sur les accords de Marrakech de 1994 et IMPÉRATIF d’exclure les productions agricoles des accords globaux de libre échange.

Ensuite, la nécessaire transition écologique ne peut justifier la mort de l’agriculture française.

Trouver un juste équilibre entre adaptation au changement climatique, protection de l’environnement et de la biodiversité et sauvegarde d’un agriculture de production et d’exportation passe en premier lieu par un moratoire sur les normes environnementales. Dans le même temps il faut augmenter les crédits dédiés à la recherche agronomique et agri-environnementale afin de permettre aux agriculteurs de produire propre, en quantité suffisante pour garantir la souveraineté alimentaire et à des coûts de production soutenable économiquement.
De même, un paysan doit pouvoir vivre décemment de son travail et ne pas dépendre de la grande distribution, des subventions européennes et des aides gouvernementales en cas de crise.
Il convient de mettre fin aux lois EGALIM qui ne sont que de la poudre aux yeux en matière de rapport de force entre producteurs et grande distribution et leur substituer une législation qui garantirait au producteur un prix de vente équivalent de 1,3 à 1,5 fois le coût de production, sans que les augmentations issues des aléas climatiques ou économiques ne puissent être répercutées à 100% sur le consommateur.
L’alimentation n’est pas un bien de consommation ordinaire et ne doit pas répondre qu’à la loi du marché. D’autant que la population mondiale augmentant dans les proportions que nous connaissons – elle est aujourd’hui à 8,1 milliards quand elle était à moins de 1,7 milliards en 1900- , les besoins en aliments vont croître dans des proportions remises en cause par le changement climatique.

Il faut enfin débureaucratiser la production agricole et agroalimentaire.

Comme d’ailleurs bien d’autres domaines, notre pays étant le champion du monde de la sur-administration.
Qu’il s’agisse de l’installation d’un jeune agriculteur, de la transmission d’une exploitation ou de la gestion des dossiers PAC tout n’est que tracasseries administratives, logique de contrôle et de sanction et finalement repoussoir à entreprendre. Dans ce domaine comme dans ceux évoqués auparavant, sans changement de logiciel , il n’y aura malheureusement pas d’avenir pour une agriculture performante, rémunératrice , souveraine et durable.

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Pascal BRINDEAU
Ancien Député-Maire de Vendôme

Les propos relayés dans cette publication n’engagent que leur auteur. Ruptures ne pourrait être tenu pour responsable.

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